Le cessez-le-feu se maintient vendredi au Haut-Karabakh, malgré plusieurs violations, après la capitulation des séparatistes arméniens face à l'offensive éclair de l'Azerbaïdjan dans cette enclave du Caucase.
Selon le dernier bilan des séparatistes arméniens, l'opération militaire azerbaïdjanaise qui s'est achevée en 24 heures mercredi à la mi-journée a fait au moins 200 morts et 400 blessés.
Cette offensive de l'Azerbaïdjan, qui a abouti à l'instauration d'un cessez-le-feu mercredi, a fait l'objet d'une passe d'armes entre Erevan et Bakou devant le Conseil de sécurité de l'ONU, réunie d'urgence jeudi à la demande de la France.
Prenant la parole le premier, le ministre arménien des Affaires étrangères a notamment affirmé qu'il n'y avait pas "deux parties dans ce conflit mais un agresseur et une victime", et accusé Bakou d'avoir lancé une offensive "injustifiée et planifiée.", visant à "finaliser le nettoyage ethnique" au Haut-Karabakh.
Ararat Mirzoyan a également accusé Bakou d'avoir mené des "bombardements intenses, sans discernement et d'utiliser de l'artillerie lourde, y compris le recours interdit de bombes à sous-munitions".
Son homologue azerbaïdjanais Djeyhoun Baïramov, lui a déclaré une "campagne de désinformation" d'Erevan, qu'il a accusé d'"alimenter et de soutenir les séparatistes".
En dépit d'un accord sur la cessation des hostilités, "cinq violations du cessez-le-feu" ont été enregistrées "dans les districts de Chucha (deux) et de Mardakert (trois)", selon le ministère russe de la Défense dans un communiqué.
Des tirs, dont l'origine n'est pas connue, ont également été entendus à Stepanakert, la capitale des séparatistes, par un correspondant de l'AFP présent sur place.
Toutefois, malgré des "violations isolées", le cessez-le-feu entré en vigueur mercredi est "globalement" respecté, a estimé le Premier ministre arménien Nikol Pachinian.
Poursuite des pourparlers
Bakou et les séparatistes arméniens du Haut-Karabakh se disent prêts, malgré tout, à poursuivre les pourparlers sur une réintégration de ce territoire sécessionniste à l'Azerbaïdjan, qui ont débuté jeudi à Yevlakh, une ville à 295 km à l'ouest de la capitale, Bakou.
La présidence azerbaïdjanaise, qui a qualifié de "constructives" les deux heures de discussions, a annoncé qu'une nouvelle réunion aurait lieu "le plus rapidement possible".
"Les parties ont insisté sur la nécessité de discuter de tous les problèmes existants dans un environnement paisible et ont fait partie de leur disposition à prolonger les réunions", ont commenté les séparatistes dans un communiqué.
De son côté, le Premier ministre arménien Nikol Pachinian a accusé jeudi la Russie, dont un contingent est déployé au Haut-Karabakh depuis la dernière guerre de 2020, d'avoir échoué à sa mission de maintien de la paix.
"Je ne pense pas que nous devons fermer les yeux sur l'échec du contingent de (maintien de la) paix au Haut-Karabakh", a-t-il déclaré à la télévision.
Selon l'Azerbaïdjan, six soldats de la paix russes ont été tués lors de deux incidents séparés pendant l'offensive de Bakou au Haut-Karabakh.
Le président Aliev a présenté jeudi "ses excuses" au président russe Vladimir Poutine pour ces morts.
Manifestations à Erevan
Sur la place centrale d'Erevan, la capitale de l'Arménie, des milliers de manifestants étaient rassemblés devant le bureau du Premier ministre dénonçant un risque de "génocide" au Karabakh.
"Nous devons sauver les enfants du Karabakh du génocide !", pouvait-on lire sur une banderole, parmi les nombreux drapeaux arméniens agités par les manifestants.
"C'est notre jour de honte. Nikol nous a volé notre patrie", a souligné Arkady Balayan, pharmacien de 32 ans.
La capitulation des séparatistes a fait monter la pression sur le Premier ministre arménien, accusé de ne pas les avoir aidés. Toutefois, ce dernier a exhorté jeudi les Arméniens à emprunter "le chemin" de la paix, même s'il n'est "pas facile".
Au cours d'une conversation téléphonique avec son homologue azerbaïdjanais, M. Poutine a demandé que "les droits et la sécurité" des Arméniens du Haut-Karabakh soient garantis.
Le succès militaire des Azerbaïdjanais nourrit les craintes d'un départ massif des 120.000 habitants de cette enclave, bien que l'Arménie a promis qu'aucune évacuation de masse n'était prévue. Elle est cependant préparée pour accueillir "40.000 familles" de réfugiés, a assuré jeudi M. Pachinian.
Plus de 10.000 personnes, dont des femmes, des enfants et des personnes âgées, ont déjà été évacuées, a fait savoir mercredi soir un responsable séparatiste.
Ce territoire, majoritairement peuplé d'Arméniens, a déjà été le théâtre de deux guerres entre les anciennes républiques soviétiques du Caucase que sont l'Azerbaïdjan et l'Arménie : l'une de 1988 à 1994 (30.000 morts) et l'autre à l'automne 2020 (6.500 morts).
La Rédaction (avec AFP)